Le 20 juin 2015, au terme d’une irrespirable prolongation, nos U20 sont champions du monde. Une victoire 1-2 sur le Brésil, qui scelle le plus bel exploit post-yougoslave du football serbe. Promis à un bel avenir, les 21 sélectionnés ont tous connu des fortunes diverses. Aujourd’hui, Fudbalski Hram s’intéresse aux « Orlici » qui ont réussi.
Des grands noms, encore méconnus il y a cinq ans, ont émergé suite à cette aventure néo-zélandaise. Il faut dire que les « jeunes aigles » étaient alors entraînés par Veljko Paunovic, l’un des techniciens serbes les plus axés sur la formation. Pour cause, à la fin de sa carrière de joueur, il fait toutes ses classes de coach dans l’appareil de la FSS. Successivement sélectionneur des U18, des U19, et des U20, il connaissait de facto ses espoirs depuis quelques années. Il les suivait comme un père suit son fils sur le chemin de l’école.
Il a pris le temps de créer un groupe uni, une osmose jamais vue dans une équipe serbe depuis 2010, et surtout, de leur inculquer sa philosophie de jeu. Comment déterminer si un ancien espoir est dans le peloton de tête ? Nous prenons en compte plusieurs critères. Le club dans lequel il évolue, son temps de jeu, ses performances et ses perspectives d’avenir. Découvrez les six aigles blancs qui ont su capitaliser sur leur sacre lors de la Coupe du Monde U20, en 2015.
Predrag Rajkovic : Formé à la belle école de Zvezda, même s’il a débuté à Jagodina, le natif de Negotin avait réalisé une Coupe du Monde exceptionnelle. Élu « gant d’or » de la compétition, il a sauvé l’arrière-train de ses coéquipiers à plusieurs reprises. Quatre prolongations dont une séance de tirs au but brillamment réussite par le portier, il s’est révélé au monde entier. Il n’a pas tardé à quitter l’Étoile Rouge, mais pour une destination inattendue, le Maccabi Tel-Aviv. Il avait d’autres offres, notamment en Europe, mais a préféré le championnat israélien. Drôle de choix, mais qui s’est avéré payant. Le Serbe, titulaire indiscutable dans les cages, a engrangé de l’expérience en C1 et en C3. Après quatre saisons passées au Maccabi et près de 200 matchs, l’ancien Belgradois s’engage avec Reims. Les Champenois déboursent cinq millions d’euros pour l’international serbe. Recrue la plus chère de l’histoire rémoise, signe d’une confiance aveugle accordée à Rajkovic. Et c’est un succès puisqu’il garde les cages de la meilleure défense de Ligue 1 la saison dernière avec seulement 18 buts encaissés en 27 matchs. Hélas, il ne disputera pas la Ligue Europa, ayant perdu lors du troisième tour préliminaire contre MOL Vidi.
Mijat Gacinovic : Titularisé tout au long de la compétition, excepté pour les huitièmes de finale et la finale, l’actuel milieu de Francfort avait fait forte impression en Nouvelle-Zélande. Au cœur d’un milieu bien huilé, le natif de Novi Sad avait pu montrer ses qualités techniques. À la suite de la Coupe du Monde, Gacinovic est repéré par l’Eintracht Francfort, qui débourse 1,25 million d’euros pour le joueur formé à Vojvodina. Il s’impose dès sa seconde saison comme un titulaire indiscutable, et est aujourd’hui au club depuis cinq années. L’exercice 2019-2020 est légèrement plus délicat pour le Serbe, souffrant d’une blessure récurrente à l’adducteur. Il a perdu sa place dans le XI au profit de Sebastian Rode, l’ancien relayeur du Borussia Dortmund. Ce qui précipite donc son transfert à Hoffenheim à l’été 2020. Avec une Coupe d’Allemagne, et cinq saisons de haut niveau avec Francfort, marquée par une demi-finale de Ligue Europa, l’ancien de Vojvodina a réussi à s’imposer en Bundesliga. Pari pas évident lorsqu’on sait que beaucoup d’espoirs se brûlent les ailes, attirés par le prestige des grands championnats.

Sergej Milinkovic-Savic : Ce nom sonne, bien entendu, comme une évidence. Il est sans conteste le footballeur ayant, pour le moment, la plus belle carrière parmi ses anciens coéquipiers U20. Il faut dire que la carrière du milieu polyvalent est un long fleuve tranquille. Il n’a, en tant que joueur, jamais connu la difficulté. D’une part car, contrairement à certains U20 de l’ancienne génération dorée, il a su rester sérieux dans son travail, et ne pas s’enflammer. D’autre part car le natif de Lleida, en Espagne, a toujours été au-dessus du lot. Aussi bien physiquement, avec son mètre 91, que techniquement avec sa patte droite chirurgicale. L’ascension crescendo du « Sergent » n’est pas donc pas due totalement au hasard. En 2014, il a 19 ans lorsqu’il signe à Genk, en Belgique, équipe réputée pour mettre ses jeunes en valeur. Le Serbo-espagnol n’est pas encore champion du monde avec les jeunes aigles que Genk achète le milieu 1 million d’euros à Vojvodina. Là encore, un sacré pari, gagnant, puisqu’en une saison, il dispute 24 matchs, inscrit cinq buts, et fait l’unanimité en Belgique. C’est alors que son aventure néo-zélandaise va bouleverser son destin. Buteur en poules face au Mali, « Il Sergente » réalise une Coupe du Monde sensationnelle, le propulsant ballon de bronze de la compétition. Il est le troisième meilleur joueur de la compétition, accessoirement champion du monde U20, et c’est là que la Lazio va pointer le bout de son nez. Contre toute attente, les Romains offrent 18 millions d’euros à Genk pour s’attacher les services de Milinkovic-Savic. Il est à l’époque l’un des Serbes les plus chers de l’histoire avec Aleksandar Mitrovic. Il est désormais indéboulonnable à la Lazio, où il s’y épanouit depuis 5 ans maintenant. Il compte 215 matchs avec les Laziale, pour 41 buts et 28 passes décisives. Tous les voyants sont au vert pour Sergej Milinkovic-Savic, rare ancien espoir serbe à avoir su garder les pieds sur terre. En sélection, le milieu compte 20 sélections et trois buts, dont un très important, contre la Norvège en prolongation de la demi-finale de barrages d’Euro 2021.
Nemanja Maksimovic : En voilà un autre qui a plutôt bien mené sa barque. Pourtant rien n’était joué pour le milieu central de Getafe. Nemanja Maksimovic fait ses classes en équipes jeunes de Zvezda, pas le plus talentueux, mais pas le plus mauvais non plus. Un footballeur tout à fait classique à l’époque. Les Belgradois sont assez réticents à l’idée de faire signer un contrat professionnel à l’ancien joueur d’Astana. D’autres espoirs étaient davantage plébiscités comme Dusan Zivkovic ou Nemanja Ahcin pour ne citer qu’eux. En 2013, il est en fin de contrat avec les « Crveno-beli » et s’engage avec la Primavera du Hellas Vérone. Un choix en apparence judicieux puisque la formation est connue pour avoir des équipes jeunes performantes. Seulement, il ne convainc pas, et les deux parties se séparent à l’amiable six mois après l’arrivée du natif de Banja Koviljaca. Le NK Domzale, club de haut de tableau slovène, met le grappin sur Maksimovic. Après deux exercices satisfaisants, le Serbe s’envole pour Astana qui débourse deux millions d’euros pour le milieu central. Une coquette somme pour quelqu’un n’ayant même pas joué 30 matchs de PrvaLiga slovène. Aussi, le choix n’est pas si étonnant que ça puisqu’Astana joue en Ligue des Champions. Son nom commence alors à circuler en Serbie, et Veljko Paunovic l’embarque dans ses bagages, direction la Nouvelle Zélande. Il dispute les sept matchs, marque deux buts, et s’impose comme le dépositaire du jeu serbe, avec à ses côtés SMS et Zdjelar pour l’épauler. Malgré tout, le joueur formé à l’Étoile Rouge décide de rester au Kazakhstan afin d’engranger de l’expérience dans les matchs européens. Là aussi, on soulignera que l’ancien belgradois a opté pour la stabilité. Tandis que dans le même temps, nombre d’espoirs ont brûlé les étapes et leurs rêves de carrières prestigieuses par la même occasion. En 2017, il s’engage avec Valence où il y restera une saison. Peu titularisé, Getafe débourse en 2018 10 millions d’euros pour l’intégrer à son XI. Il est pour l’heure le footballeur le plus cher de l’histoire du club de la banlieue madrilène. Au total, il a joué 91 matchs pour trois buts et une passe décisive avec les « Azulones ». Dans le jeu, il est à l’aise techniquement, est le vrai métronome de son équipe, mais a encore des progrès à faire afin d’être plus décisif. Nemanja Maksimovic est l’un des meilleurs milieux de Liga la saison passée, la route est toute tracée pour faire une belle carrière.

Marko Grujic : Après des saisons décevantes, Marko Grujic a trouvé son rythme de croisière à Berlin. Prêté deux ans au Hertha, il avait auparavant signé à Liverpool pour sept millions d’euros. Lui aussi, formé à la belle école de Zvezda, il s’envole pour l’Angleterre en 2016, 6 mois après son sacre mondial. La suite, c’est deux prêts à l’Étoile Rouge et à Cardiff, peu concluants. Si son père était opposé à un transfert en Angleterre, c’est parce qu’il pensait que son fils n’aurait pas un temps de jeu nécessaire. Visionnaire. Après une aventure concluante à Berlin, le milieu a été prêté à Porto où il endosse, pour le moment, un rôle de remplaçant. En équipe nationale, le Belgradois compte neuf sélections, qui s’expliquent par la forte concurrence à ce poste. À 24 ans, Marko Grujic semble enfin avoir laissé les galères de côté.
Milos Veljkovic : La donne est légèrement différente avec Milos Veljkovic, l’actuel défenseur central du Werder Brème. En effet, le Serbe est né à Bale, en Suisse, et possède la double nationalité. Il aurait pu faire ses classes espoirs avec la « Nati », mais il a opté pour la Serbie. Pas un choix par défaut, puisque l’arrière, formé au FC Bale et passé à Tottenham, était considéré comme un grand espoir helvète. Hélas, il ne s’imposera jamais à Londres, et après deux prêts en Championship peu satisfaisants, le Werder débourse 330 000 euros pour Veljkovic. Un choix intelligent pour se relancer. Il débute en 2016 avec l’équipe réserve, en troisième division allemande, avant de rapidement gagner une place dans le XI titulaire. Avec sa formation, il joue le milieu de tableau en Bundesliga. Même si cette saison, le Werder pointe à la 16ème place, celle du barragiste. Il n’est pas étranger aux mauvais résultats des Brêmois, souvent irrégulier cette année, et cumulant les pépins physiques. Toutefois, celui qui a joué l’intégralité des rencontres à la Coupe du Monde U20 a des qualités. Polyvalent, pouvant évoluer milieu défensif, et capable d’imposer un énorme impact physique. L’optimisme est donc de mise pour Milos Veljkovic, qui a fourni de très belles prestations ces quatre dernières années en vert et blanc.