Seconde et dernière partie de notre mini-série consacrée aux formations serbes ayant déposé le bilan, ou évoluant désormais dans les divisions inférieures. La majorité de ces équipes a connu un glorieux passé. Ils ne sont maintenant que l’ombre d’elles-mêmes.
- FK Jagodina
Quand on entend Jagodina, on repense forcement aux bonnes vieilles heures de la SuperLiga, dans les années 2010, quand le niveau était plus élevé que maintenant. Certains ont même grandis avec le FK Jagodina régulier prétendant aux places européennes. Tout cela n’est désormais que passé, balayé d’un revers de la manche par un dépôt de bilan soudain.
Pourtant Jagodina n’a pas toujours joué les premiers rôles en Yougoslavie. Crée en 1919 sous le nom du JSK Zora, il faudra attendre 1962 pour que la structure adopte son actuel patronyme. Juste avant les prémices du conflit mondial dans les années 1930, le JSK était l’une des équipes les plus réputées du royaume. Ville de 70 000 habitants, jadis industrielle mais toujours modeste, elle arrive à hisser son club de foot parmi les meilleurs du pays. La guerre changera radicalement la donne et les « plavi » (ndlr : les bleus) retombent dans l’anonymat des divisions de seconde zone.
Près de 60 années de disette pour Jagodina qui tutoiera à nouveau les sommets en 2008. Après 3 promotions consécutives, une en Ligue serbe de l’Est (ndlr : D3), une en PrvaLiga et l’autre en SuperLiga, les hommes de Milojko Gosic terminent 10ème du championnat. Une belle place de milieu de tableau pour des joueurs encore en 4ème division il y a 3 ans.
Les « Plavi » continuent de monter en puissance et lors de la saison 2010-2011, Jagodina décroche une 4ème place synonyme de tours préliminaires de qualification pour la Ligue Europa. Malheureusement, les coéquipiers de Milos Stojanovic butteront sur les Kazakhs d’Ordabasy lors du premier match. Ce n’est que partie remise. Ils achèvent l’année 2013 sur une 3ème place, remportent leur première Coupe de Serbie, et le tout, avec un certain Predrag Rajkovic dans les cages.
Les hommes de Simo Krunic, coach depuis 2011, battent des records. Dans le même temps, ils développent leur centre de formation, qui devient rapidement une référence en Serbie. Rajkovic, cité ci-dessus, mais aussi Aleksandar Filipovic, l’international qui joue au BATE Borisov ou encore le jeune Marko Mrkic. Hélas, ils ne se qualifieront jamais pour une phase de groupe de Ligue Europa, puisqu’ils butteront à chaque fois lors du second tour.
Le succès va repartir aussi vite qu’il est arrivé, avec une relégation en PrvaLiga au terme d’une saison 2015-2016 catastrophique, sur fond de difficultés financières. Le club, suite à une gestion hasardeuse des subventions liées à leurs résultats sportifs, accumule alors énormément de dettes. Après 2 exercices dans le second échelon, Jagodina décide de déposer le bilan en septembre 2018. Pourtant, en Aout, le président Goran Milanovic avait formellement écarté cette hypothèse-là. Depuis le FK Jagodina n’existe plus.

L’association sportive s’est recrée sous le nom FK Jagodina-Tabane et évolue encore dans le « Jagodina stadion » de 15 000 places. Rétrogradé en 5ème division, la formation tente de refaire surface et y parvient. 2 montées en autant d’années, pour se retrouver aujourd’hui dans le 3ème niveau du football serbe. Leader avant l’interruption des matchs avec 5 unités d’avance sur son dauphin, le retour dans le monde professionnel n’a jamais semblé aussi proche pour les « plavi ».
- Hajduk Kula
Basé à Kula, en Voïvodine, le Hajduk, nom des fameux brigands, tantôt chefs de guerre, « Haïdouk » en Français, qui sévissaient pendant l’occupation de l’Empire ottoman. En Serbie, le Hajduk est à l’origine de deux dynasties royales : Les Karadjordjevic et les Obrenovic. Pour le Hajduk Kula, la logique d’arborer ce terme réside dans l’identitarisme.
Le premier club à Kula est le KAFK (ndlr : Kulski atletski fudbalski klub), fondé en 1912. L’ancêtre du Hajduk Kula, qui est né d’une scission du KAFK en 1925. Par ailleurs, ce dernier adopte le patronyme de JSK (ndlr : Jugoslovenski sportski klub).
Malgré cette séparation à l’amiable, l’équipe végétera dans les ligues inférieures et sera prohibée par les Allemands lors de la seconde guerre mondiale. L’après-guerre sera davantage radieux pour Kula. En 1949, la formation réapparait et développe sa section omnisport. Toutefois, les premiers résultats probants pointeront le bout de leurs nez en 1991. Une montée en SuperLiga et depuis aucune relégation jusqu’en 2013, date de dissolution du club pour problèmes financiers. En parallèle, un changement de nom est effectué, afin de devenir le « Hajduk Rodic M&B Kula ».

Un « naming » précoce dans le football moderne, mais surtout un investisseur de poids. Rodic M&B, entreprise localisée à Novi Sad, touche à tout. BTP, grandes surfaces, hôtellerie… Une aubaine pour le club. Il s’installe durablement dans le haut de tableau, se qualifiant en 1997 pour la phase de groupe d’Intertoto et disputant en 2006 un second tour préliminaire de Ligue Europa, contre le CSKA Sofia. Aussi, comme l’Étoile Rouge et le Partizan, la structure de Voïvodine va se doter d’un club satellite, le Lipar MB, disparu depuis.
Le début des troubles budgétaires arrive en 2005. Le sponsor lâche ses poulains suite à des affaires judiciaires, et les coéquipiers de Dejan Osmanovic sont plongés dans l’incertitude. Malgré tout, le Hajduk Kula résiste sous assistance respiratoire à sa mort annoncée, avant de définitivement passer l’arme à gauche en 2013.
- Proleter Zrenjanin
Contrairement à ses homologues, le Proleter Zrenjanin est une structure relativement jeune, comparée aux autres, datant généralement de l’entre-deux-guerres. C’est en 1947 que le pouvoir communiste encourage l’éclosion d’un club à Zrenjanin. Rapidement, le succès sourit aux rouges et blancs. En 1951, ils se hissent en quarts de finale de Coupe contre le Dinamo Zagreb.
Une rencontre perdue mais qui restera pour longtemps dans les annales de Zrenjanin. Toutefois, le Proleter n’atteindra la plus haute marche du championnat qu’en 1990. Bien que les résultats sportifs soient relativement moyens, leur centre de formation est reconnu dans les années 1950. Ils parviennent à sortir des joueurs comme Radoslav Becejac ou encore Milan Galic, tous deux internationaux. Plus récemment d’autres joueurs de renom ont aussi pu sortir de la réputée académie de Zrenjanin, comme Darko Kovacevic par exemple.

En 1992, les joueurs de Voïvodine intègrent la nouvelle ligue yougoslave, dénuée de Croates et de Bosniens. Le conflit est presque une aubaine sportivement parlant, puisqu’ils ont enfin l’occasion de jouer en SuperLiga. La joie va être de courte durée. Après une phase de groupe d’Intertoto en 1997, Zrenjanin est relégué en PrvaLiga en 2000. Les joueurs ne remonteront plus jamais, et comme souvent, une descente peut être synonyme de catastrophe économique.
Ce fut bel et bien le cas pour le Proleter. Le club met la clef sous la porte en 2005, conservant néanmoins la dimension omnisport avec le basketball ou encore le water-polo. En 2006, sur les ruines du Proleter, une nouvelle équipe du nom du FK Banat Zrenjanin émerge. Celle-ci est très mal vue par son ancêtre, qui fait des pieds et des mains pour ne pas que le FK Banat s’empare du stade de la ville. Opération ratée. Ils pourront néanmoins se consoler, car après 10 années d’existence, la nouvelle formation plie boutique, encore une fois, faute de moyens.
- FK Bor

Situé à Bor, proche de la frontière bulgare, il voit le jour en 1919 sous le nom « Association sportive de Bor ». Arborant les couleurs vertes rayées de noires, en hommage au passé minier du club, son histoire est intimement liée à la France. Les mines de cuivre de la ville étaient à l’époque administrées par une firme franco-serbe, qui a décidé de créer l’ASB en 1919. Avant le conflit de 1939, qui a forcément paralysé le football local, le FK Bor était une formation de renom en Yougoslavie.
Cependant, ils connaissent leurs premiers trophées dans l’après-guerre, principalement des titres de champion de seconde division, en 1968 et 1972. Ils atteignent, toujours en 1968, la finale de la Coupe de Yougoslavie. La même année, ils échoueront lors du premier tour qualificatif pour l’UEFA contre le Slovan Bratislava. Cela restera sans doute la période la plus faste pour le FK Bor. Mais comme souvent, il connaît ses premiers troubles à la fin de la guerre, avec une dette faramineuse.
Stagnant entre le 3ème et 5ème niveau du football serbe, la banqueroute assène le coup de grâce en 2017. Après une saison blanche, sans compétition, l’association sportive se détache de la structure et recrée le FK Bor 1919, actuellement dans le « Bor District », l’équivalent de la 5ème division.
- OFK Kikinda
À ses débuts, en 1909, la ville de Kikinda se situe encore en Autriche-Hongrie. La majorité des joueurs de l’équipe est donc Hongroise. Le patronyme du club en est une preuve fondamentale puisqu’il s’appelle « AC Nagykikindai ».
Le nom de la ville Kikinda a donc été magyarisé. Ils évoluent en première division austro-hongroise, en compagnie d’autres villes bien connues de la région, comme Timisoara, Zagreb, Szeged ou encore Arad. Le 1er décembre 1918, la Voïvodine redevient Serbe, et Kikinda est intégré au championnat local. Hélas, la structure va rester relativement modeste, se nommant désormais le SK Srbija, malgré les bonnes performances réalisées dans la ligue austro-hongroise. Le SK deviendra le OFK Kikinda qu’en 1970.
Entre ces deux périodes, le calme plat pour les « vokovi » (ndlr : lions). Ils montent enfin en PrvaLiga en 1976, et s’offrent en 1980 une demi-finale de Coupe contre le Dinamo Zagreb, perdue 3-1. Seulement 4 saisons dans l’élite, dans les années 90, avant de dégringoler en 5ème division. L’OFK pourra toujours se targuer d’avoir compté dans ses rangs Mladen Krstajic et Milutin Soskic.
Aujourd’hui, la formation subsiste au 4ème échelon, avec des équipes jeunes plutôt performantes. Qui sait ? Le salut viendra peut-être de la jeunesse.