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Située au centre de la Croatie, Knin sous la Yougoslavie était peuplée de beaucoup de Serbes, comme sa région, la Krajina. Durant la guerre qui a frappé de plein fouet la région à la fin du 20e siècle, les populations serbes ont été obligées de fuir en Bosnie ou Serbie, principalement pendant l’opération tempête (oluja) qui a eu lieu en aout 1995.

Deux réfugiés de la guerre en 1995, deux natifs de Knin et deux joueurs de l’Étoile Rouge Belgrade. Milan Borjan, le gardien de Zvezda, et son comparse, le défenseur Milos Degenek, partagent des cicatrices communes. Malgré cette enfance marquée par la guerre et les déménagements loin de la Serbie, les Belgradois réalisent aujourd’hui l’un de leur rêve, porter le maillot crveno-beli.


Milan Borjan, le capitaine


Né en octobre 1987, il est enfant quand sa famille quitte la ville pour la Serbie, puis au début des années 2000 pour le Canada. Il commence le foot en Amérique du nord, et se fait repérer par un club italien. Il ne pourra finalement pas rejoindre la botte à cause de problèmes administratifs. C’est ensuite Boca Junior qui repère le gardien, et où il ira faire un essai, concluant, mais un transfert sera impossible suite … à de nouveaux problèmes administratifs. Au final, il s’installe non loin de Buenos Aires, en Uruguay, au Nacional de Montevideo. Il fait ensuite le chemin inverse et signe à Quilmes, club argentin. 

Il est de retour en Serbie en janvier 2009. Au RAD Belgrade, avant de partir après pour la Turquie (Sivasspor) et la Roumanie (Vaslui). Son aventure à Sivasspor se termine mal car il est laissé libre en février 2014, et devra attendre le 12 septembre de la même année pour retrouver un club. Et non des moindre : Ludogorets, qui joue la Ligue des Champions. 4 jours après seulement, un incroyable concours de circonstances va faire que Borjan va se retrouver titulaire en Ligue des Champions contre Liverpool, à Anfield. Il y sortira une prestation immense, n’encaissant que deux petits buts dont un penalty. 

On pensait suite à cela que sa carrière allait enfin décoller, mais non, il n’est pas titulaire indiscutable en Bulgarie et va connaitre deux nouveaux prêts (AU Radnicki Nis et Kielce). Il pose ses valises à l’Etoile Rouge en juillet 2017. Il va instantanément devenir le titulaire indiscutable à son poste, avec d’excellentes prestations lors des qualifications d’Europa League. On peut également noter qu’il a été deux saisons consécutives le gardien à avoir effectué le plus d’arrêts lors de la phase de groupe de Ligue des Champions. Son statut n’a pas changé depuis son arrivée, il est même devenu capitaine suite au départ de Marko Marin. 

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Milos Degenek, le rock


Né plus tard que Borjan, pendant la guerre en avril 1994, il fuit Knin pour la Serbie puis l’Australie. Il est formé à l’Australian institute of sport, et sera repéré par Stuttgart qui le recrute pour son retour en Europe. Malgré trois ans passés chez les U-19 et l’équipe réserve du club, la défenseur central n’a pas sa place en équipe première, et un départ est obligatoire. Il lance réellement sa carrière pro en signant à Munich 1860, en seconde division allemande. Ses deux bonnes saisons à Munich ne passent pas inaperçues au Japon, à Yokohama, où il s’engage gratuitement en janvier 2017. Milos découvre donc, comme Borjan, un troisième continent grâce au football. 

Nous sommes en juillet 2018, et l’Etoile Rouge cherche un remplaçant à Damien Le Tallec, parti gratuitement à Montpellier. Degenek est la meilleure option, et il rejoint son club de cœur contre 200000 euros. Il explose littéralement, devenant l’homme clé de la défense de Vladan Milojevic, disputant plus de 90% des matchs de l’équipe. Mais la belle histoire s’arrête net en pleine saison, car Degenek a une clause de 3,6 millions d’euros dans son contrat qu’un club des Emirats, Al-Hilal a levé. Stupeur chez les supporters qui n’étaient pas au courant de cette clause, Degenek rejoint donc la meilleure équipe d’Asie, avec un gros salaire à la clé.

Il devient un élément important d’Hilal, et s’acclimate bien à la vie dans le golfe. Mais les équipes de son championnat ont une contrainte, un nombre limité de joueurs étrangers pouvant disputer les matchs (comme en Serbie, avec la seule différence qu’il a le passeport serbe). Son entraineur ne compte plus vraiment sur lui, son avenir est donc incertain à Ryad. L’Etoile Rouge sent la bonne affaire et profite pour le faire revenir dans ses rangs, et remplacer cette fois-ci Vujadin Savic. Il est prêté avec option d’achat d’1,5 million d’euros, qui sera levée peu après. Il dispute l’intégralité des matchs de Ligue des Champions une nouvelle fois, et redevient le patron qu’il était. 


Ndlr : Milan Borjan et Milos Degenek auraient pu jouer avec la sélection serbe, mais ils ont préféré remercier à leur manière leur pays d’accueil, qui leur a permis de devenir ce qu’ils sont aujourd’hui, après une enfance mouvementée suite à la guerre de Yougoslavie.

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