PAS DE TATOUAGES, PAS DE COUPES DE CHEVEUX BARIOLÉES, PAS D’EXUBÉRANCES SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX… IL FAUT LE DIRE, STEFAN MITROVIC N’EST PAS LE FOOTBALLEUR LE PLUS “SEXY” DE SA GÉNÉRATION. RETOUR SUR LE PARCOURS MOUVEMENTÉ DU PLUS ALSACIEN DES SERBES.

Désormais capitaine du Racing Club de Strasbourg, ses débuts dans le monde professionnel furent pour le moins tumultueux. Le natif de Belgrade chausse les crampons pour la première fois en 2000, il a 10 ans

Un début de carrière modeste

Il s’épanouit alors dans le club de son quartier, le Rad Belgrade. Il défend les couleurs des « Gradjevinari » et fait ses classes de jeunes au « Kralj Petar Stadion » jusqu’en 2003. Il passe ensuite 5 ans au centre de formation de l’Étoile Rouge entre 2003 et 2008, mais n’est pas conservé. Il rebondit au Rad, le club de son enfance. Au total, il aura passé 4 ans chez les marines et bleus et 5 à Zvezda. Il admet volontiers à « Libération » qu’il n’était pas « le meilleur de l’académie ». Joueur besogneux, il a toujours travaillé plus que les autres pour arriver au très haut niveau.

En manque de liquidités, les clubs serbes vendent régulièrement leurs jeunes joueurs à l’étranger. C’est le cas de la formation belgradoise qui laisse partir son espoir à 19 ans. Sans même avoir pu défendre les couleurs de son club formateur en SuperLiga.

C’est un chemin de croix qui se profile pour le Strasbourgeois. Une pige en Slovaquie, au MFK Petrzalka, suivie d’une en République Tchèque au Zbrojovka Brno et un retour au pays en 2011. Les débuts sont difficiles pour Stefan Mitrovic, mais il ne lâche rien. Cette détermination symbolise le joueur qu’il est aujourd’hui devenu. « Il y a les talentueux, et ceux qui travaillent » témoigne Stefan Mitrovic, toujours à « Libération ».

Taulier de la défense du Metalac Milanovac, il n’empêche pas la relégation de sa formation en PrvaLiga. Toutefois, il commence à enchainer les matchs et à se faire remarquer. Il tape dans l’œil du KV Courtrai, et s’impose durablement comme le roc de la sentinelle belge. Avec le KV, il termine 9ème de la saison régulière et sa carrière décolle enfin.

À Valladolid, l’envol

Hormis un passage éclair au Benfica, où il ne prendra part qu’à 8 maigres rencontres avec l’équipe B, il est prêté lors du mercato hivernal 2014 à Valladolid. Les Espagnols évoluent en Liga, et Mitrovic va se mettre en évidence suite à une rencontre contre le FC Barcelone, remportée 1-0. Il met dans sa poche Neymar et Messi. Les médias serbes commencent à s’enflammer pour le défenseur, qui semblait totalement absent des radars de la presse locale. Une mini-revanche presque pour le natif de Belgrade, décrié lorsqu’il jouait à Milanovac et souvent critiqué pour son style de jeu.

Il faut dire qu’avec 2 ou 3 tatouages, une présence massive sur Instagram, Twitter et consort et quelques frasques à droite à gauche, le joueur aurait pu faire parler de lui. Il serait alors devenu ce genre d’homme arrogant dont les tabloïds serbes raffolent. Hélas, ou plutôt tant mieux, il n’est pas comme ça.

2014, après une demi-saison pleine en Liga, le graal. Ljubinko Drulović, le sélectionneur de l’époque, fait appel à lui pour affronter le Panama en match amical.

Fribourg s’adjuge les services de l’ancien lisboète pour 1,5 millions d’euros. Les difficultés recommencent pour l’international. Son entraineur ne lui fait plus confiance, il ne prend part qu’à 14 rencontres de championnat. « Le coach m’avait fait beaucoup de compliments » concède-t-il. Il est aussi plombé par une déchirure musculaire qui aura raison de son aventure allemande. Toujours travailleur, jamais pessimiste, il est envoyé en prêt à La Gantoise. Il s’affirme alors comme un élément enfin indispensable de son effectif, dispute ses premières rencontres européennes et s’installe durablement parmi les 23 aigles blancs.

La confirmation à La Gantoise

Définitivement, il jouit d’un nouveau statut à La Gantoise. Celui d’un titulaire indiscutable, sur lequel l’entraîneur a une confiance sans faille. Pour preuve, il reste 3 saisons en Belgique. Jamais le défenseur ne sera resté aussi longtemps dans un club. Enfin de la stabilité pour « Mitro ». Il prend part à 112 rencontres, dont 22 en Ligue Europa. Il se mue même en buteur. Inscrivant plus de buts avec les « Buffalos » qu’avec toutes ses formations précédentes.

Stefan Mitrovic attire les prétendants, son nom commence à circuler en France, et l’AS Saint-Etienne se prépare à l’enrôler dans le Forez pour près de 4 millions d’euros. Hélas, le joueur se blesse à la cheville lors de la seconde partie de l’exercice 2017-2018 et le transfert tombe à l’eau. Ce n’est que partie remise. Il s’engage avec le Racing Club Strasbourg quelques mois plus tard, moyennant 3 millions d’euros, et s’impose comme le roc de la défense alsacienne.

« Le niveau du championnat de France est élevé et je suis très heureux de rejoindre le RC Strasbourg, qui est pour moi un top club. Je souhaite pouvoir y apporter toute mon expérience » réagit le Serbe à sa signature.

Thierry Laurey lui accorde son entière confiance, même lorsque le Belgradois passe à travers. Une confiance qui se caractérise par le brassard de capitaine, que le joueur arbore depuis quasiment ces débuts au Racing. Les supporters, eux, ont adopté leur défenseur. En témoigne les messages d’affections sur les réseaux sociaux. Il y a aussi eu les sceptiques, qui le sont en général beaucoup moins. Il a enfin su convaincre grâce à sa simplicité qui lui faisait tant défaut dans un football gangréné par le paraitre.

Il totalise désormais 71 matchs avec le RCSA, son premier trophée avec une Coupe de la Ligue, et est parti pour s’inscrire dans la durée en Alsace.

En sélection, un match charnière

Avec les « orlovi », il dispute 15 matchs. Pas sélectionné pour la Coupe du Monde 2018, il fait quelques apparitions par intermittences depuis 2014. Il prend part au fameux match contre l’Albanie en octobre 2014. D’habitude très discret et peu belliqueux, il s’est distingué pour s’être saisi du drapeau de la grande Albanie flottant au-dessus du toit du JNA Stadion. 

Son geste, fort de sens, a entrainé l’arrêt prématuré de la rencontre et la défaite de la Serbie 0-3 sur tapis vert. Mais nul doute qu’il restera dans le cœur des supporters pour avoir défendu bec et ongles l’honneur de sa patrie un soir de qualification pour l’Euro 2016. Toutefois, il est relégué sur le banc voir hors des 23, au regard de la concurrence féroce en sélection à son poste. 

By Sacha Tisic

Journaliste. Je n'ai confiance qu'en mon Desert Eagle et en Mitrović dans les arrêts de jeu.

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